Poésies d'inspiration chrétienne



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Je voudrais…

Je voudrais que l'on dise à tous les affamés
D'idéal, de bonté, d'entente fraternelle :
" Venez, vous qui voulez une vie haute et belle,
Venez à nous, pour être heureux, pour être aimés ! "

Etre heureux !… être aimés !… Paroles merveilleuses
Qui semblent distiller du bonheur et du jour !…
Etre aimés !… Tous viendraient à l'espoir de l'amour,
A cet appât divin des minutes heureuses.

Seigneur, vous avez dit : " Venez ! " Vous l'avez dit,
Et vous le répétez comme un père, sans cesse.
Celui qui vient à vous pratique la sagesse
Et vous l'élèverez ainsi qu'il est écrit.

Combien sont-ils qui comprennent votre promesse,
Qui veulent en goûter la douceur ici-bas,
Et qui mettent leurs pas affermis dans vos pas,
Même si le chemin est rugueux et les blesse ?

Combien sont-ils ceux qui, dans la simplicité,
Vous aiment avec joie au profond de leur être,
Et vous ayant cherché, savent, ô divin Maître,
Qu'en Vous trouvant, ils ont enfin la Vérité !

Ceux-là sont les aimés, car la béatitude
Fleurit, ainsi qu'un lis, dans leur cœur, chaque jour ;
Ceux-là sont les heureux, car, plus leur tâche est rude,
Plus ils vont pratiquant le Pardon et l'Amour.

Pardon, d'abord à ceux qui nous furent hostiles,
A ceux qui vers le mal dirigent leurs efforts,
A ceux qui sont méchants parce qu'ils sont plus forts,
A ceux qui sont méchants parce qu'ils sont débiles !

A tous, le saint pardon que vous voulez de nous,
A tous, nos bras ouverts pour la sincère étreinte,
A tous, notre douceur quand leur haine est éteinte,
Pardon à tous, Seigneur en Vous, par Vous, pour Vous !…

Puis amour dans nos mains au-dessus des misères,
Amour, dans chaque geste, amour dans chaque appel,
Et cet appel d'amour étant essentiel,
Amour, trois fois Amour, dans toutes nos prières !

Oui, que ce soit l'amour qui fait, quand nous prions,
S'élever jusqu'à Vous notre âme libérée,
Et que ce soit l'amour dont la flamme sacrée
Vienne allumer en nous un foyer de rayons.

Seigneur, que cet immense amour soit mon partage ;
Qu'il m'entraîne aux sommets d'où l'on voit la beauté.
Oh ! n'être qu'un flambeau, n'être qu'une clarté,
Une chose d'amour très pur - pas davantage !

Mme Claire Virenque
Extrait de "Les souvenez-vous", recueil de poèmes.
Elle fonda un prix annuel de poésie spiritualiste qui fut décerné pour la première fois en 1910 ; on retrouve parmi les premiers lauréats
Noël Nouet, André Lafon, et Charles Grolleau (voir plus bas).



Seigneur, portez secours

Seigneur, portez secours à votre créature
Vous qui donnez au moindre oiseau sa nourriture.

J'ai faim : rien ici-bas n'assouvit mon désir,
C'est vous-même, ô mon Dieu, que je voudrais saisir.

Ici je me retrouve en tous les biens que j'aime :
Or ce que je voudrais, c'est sortir de moi-même.

C'est m'évader de mon néant, c'est m'enrichir
Et ce n'est qu'en vous seul que je puis m'affranchir.

Car vous êtes ma Fin, ma Cause et mon Principe,
Lumière devant qui toute ombre se dissipe !

Visitez-moi, Seigneur, mon cœur vous appartient ;
Voyez : de sa misère, humble, il vous entretient.

L'orgueilleux qui s'abuse attire la colère,
Mais celui qui s'abaisse a toujours su vous plaire.

Venez, mon Dieu, je suis si pauvre et j'ai si faim !
Je vous attends depuis longtemps, venez enfin.

C'est une telle joie en Celui qui vous garde
Que son œil éblouit les êtres qu'il regarde.

On vit dans l'harmonie, on vit dans la clarté,
On est ivre de tout, on est comme porté

Et cette jouissance au lieu de nous abstraire
Nous inspire un amour ardent pour notre frère.

Et touchés de le voir errer, nous qui savons,
Nous allons lui donner le Dieu que nous avons

Et nous le guérissons de toutes ses blessures
Sans l'irriter, avec des mains que Dieu rend sûres.

Seigneur, Seigneur, j'irai vers vous demain matin ;
Haletant, je prendrai place à votre festin.

Je mangerai le pain, je mangerai la manne
O vous le Dieu fécond d'où toute vie émane !

Et je boirai le vin et je boirai le sang,
O vigne d'Israël, Calice tout puissant !

Seigneur, sauvez ma chair et descendez en elle
Pour qu'elle coopère à la vie éternelle !

Robert Vallery-Radot (1885-1970)
Extrait de L'eau du Puits, Paris, éd. de la Revue des poètes, 1909


La Présence

Comme il est doux de vivre en vous, mon Bien-Aimé !
Mon cœur à se le dire en est tout embaumé !
O mon amour, je vous retrouve avec délice
Dans le fruit mûr, la fleur éclose, l'azur lisse !
Vous remuez l'ombre des feuilles. Cher émoi,
De vous sentir toujours présent autour de moi !
Aussitôt qu'un désir me naît, je vous consulte ;
Comme un enfant je tiens votre main et j'exulte
De voir, de respirer, d'entendre, et de songer
Combien ma tâche est claire et mon fardeau léger !
Je vais, si je rencontre un pauvre, je lui donne ;
Si mon frère m'a fait du mal je lui pardonne ;
Puis je chante que je vous aime infiniment
Et qu'on ne peut être joyeux qu'en vous aimant ;
Que vous êtes le feu sacré de mes pensées
Et la candeur qui luit aux yeux des fiancées.
Je marche ; l'aubépine embaume le chemin
Et je serre de plus en plus fort votre main.
Toutes les nuits nous retrouvons la même auberge ;
Oh ! qu'on est bien lorsque c'est Dieu qui vous héberge !
Avidement je me nourris du pain des forts
Et, pareil à Saint Jean, contre vous je m'endors…
Alors, vous me parlez de l'amour et j'écoute :
Vous me dites le Bon Pasteur, la bonne route,
L'entier oubli de soi, le figuier réprouvé,
Le royaume semblable au grain de sénevé,
La lampe de la vierge sage, la prière,
Le calice, la source vive, la lumière,
L'aurore qui blanchit, les blés qui vont germer…

Oh ! qu'il est doux de vivre en vous, mon Bien-Aimé !

Robert Vallery-Radot (1885-1970)
Extrait de L'eau du Puits, Paris, éd. de la Revue des poètes, 1909

Membre du jury chargé de décerner les prix de poésie spiritualiste, il est également l'auteur d'une Anthologie de la poésie catholique, de Villon à nos jours (éd. Georges Crès, 1916).
Il entra à la Trappe en 1945.



Béatitude

O Dieu martyr, ô Dieu lumineux, ô Dieu juste,
Qui m'avez fait vivant par votre mort auguste,
Je baise éperdument vos pieds percés de clous ;
J'y demeure à jamais, farouche, ivre, jaloux
D'étreindre contre moi la vérité suprême
Et de boire l'amour à la source elle-même !
Ma bouche est là, brûlée au feu de votre sang
Et j'écoute mon cœur battre, vaste et puissant,
Hors du temps, hors du nombre, au-dessus de l'espace,
Loin des lueurs d'un jour, loin des ombres qui passent,
Loin du monde, loin de la mort, loin du charnel,
Dans la sérénité du ciel originel.

Robert Vallery-Radot (1885-1970)
Extrait de L'eau du Puits,
Paris, éd. de la Revue des poètes, 1909.



Hymne Pascal

Alleluia ! Chantons, chrétiens, cloches, oiseaux !
Un nouveau jour paraît comme un lis sur les eaux
Et c'est un matin plein d'allégresse angélique !
La terre va lancer d'elle-même un cantique :
Ecoutons, admirons, saluons, bénissons !
Chœurs du monde et des cieux montant à l'unissons
Au lever du soleil sur les plaines en joie !
Tout le printemps terrestre est en fête et verdoie,
Et le printemps des chœurs s'évanouit en lui
Comme un iris humide et frais parmi les buis.

Bonheur d'âme parmi le grand bonheur des choses !
O double renouveau ! Aube en apothéose !
L'espoir miraculeux de la vie à jamais
Eclôt divinement dans l'herbe des sommets
Et s'unit aux frissons perpétuels des sèves.
Les rejetons noueux sont plus forts que les glaives
Et l'Amour t'a vaincue, ô Mort, au bord des cieux !

Alleluia ! Chantons ! le nuage est joyeux,
La vapeur virginale est comme une bannière,
Le cri de l'alouette est rempli de lumière
Et les saints carillons volent parmi les bois,
Au milieu des bourgeons entr'ouverts, sur les toits,
Et sur la haie en fleurs, l'eau de la mare pleine,
La brune giroflée et la fraîche fontaine,
Comme des drapeaux clairs emportés par le vent.
A l'odeur des jasmins va se mêler l'encens,
Et nous disperserons en des strophes pieuses
Nos émerveillements dans les nefs glorieuses,
Tandis que les coteaux que va dorer l'été
Frémiront en l'honneur du pur Ressuscité !

Noël Nouet
Extrait de Les Etoiles entre les feuilles,
Bibliothèque du Temps présent, 1910.
Prix de littérature spiritualiste en 1910.



Je songe, pénétré d'un grandissant effroi,
Que vous pourriez venir, ô mon Dieu, tout à l'heure :
Hôte toujours prochain de qui notre demeure
Sait si mal rendre digne et sa porte et son toit.
Je songe qu'à l'instant vous pourriez me surprendre,
Me nommer en disant : "Lève-toi, me voici !
La table est-elle prête et ton âme à m'attendre
Mit-elle son unique et plus constant souci ?"
Et je vois devant vous cette âme qui dérobe
Un visage honteux et ses regards baissés,
Tremblante de ne tendre à vos doigts offensés,
- Ainsi qu'une pauvresse au creux noir de sa robe,
Que des fruits sans éclat, par terre ramassés.

André Lafon (1883-1915)
Extrait de La Maison Pauvre,
Bibliothèque du Temps présent, 1911.
Ouvrage honoré du Prix de littérature spiritualiste en mai 1911.


Nous avons fait bénir le seuil et chaque pièce ;
Nos chevets ont la croix et la branche de buis.
Si le Seigneur passait à l'heure où le jour baisse
Et qu'il daignât entrer, il se verrait chez lui.
Le Dimanche est chômé comme veut l'Ecriture,
Nous suivons chaque office et jeûnons comme il faut ;
Et le pauvre a sa place au foyer ; la voix pure
Du dernier né répond quand nous prions tout haut.
Mon Dieu ! nous faisons tout ce qui peut être sage
Pour arracher notre âme aux périls d'ici-bas…
Gardez-nous seulement de nos propres orages
Et du mortel amour qui ne vous cherche pas !

André Lafon (1883-1915)
Extrait des Cahiers de l'Amitié de France, mars 1912.



Le Repas

Les épais marronniers emplissaient de nuit fraîche
La cour où l'on avait fait mettre le couvert ;
Les champs s'apercevaient par le portail ouvert
Au lourd midi d'été tout embaumé de pêches.

Ton visage riait. Nous avions, en chemin,
Vu l'aube s'étirer sur les collines basses.
Tu songeais. Près de nous, soufflait la chienne lasse ;
La servante cueillait des fraises au jardin.

Tu ne les voyais pas, mais, sur le mur de lierre,
Les croix du triste enclos voisin me regardaient ;
Gravement, au milieu, le clocher se levait,
Précis, sur les lointains embrumés de lumière.

Et soudain, te rappelles-tu la lourde voix
De la cloche tombant dans notre rêverie ?
L'Angelus !… Une enfant, pour saluer Marie,
Passant sur le chemin, fit un signe de croix.

Un sentiment profond emplit l'ombre des branches
Et nous de qui le cœur n'est plus religieux,
Nous avons, en rompant le pain de ce Dimanche,
Senti des pleurs d'amour éclore dans nos yeux.

André Lafon (1883-1915)
Extrait de La Maison Pauvre,
Bibliothèque du Temps présent, 1911



In memoriam

Je veux louer, Seigneur, votre droite puissante
Avec le vif regret d'avoir tant méconnu
Votre service aimable et le seul qui soit dû,
Et longtemps oublié dans le songe qui hante
Un cœur touché d'amour, votre amour éperdu.
Je veux dire ma honte et cette repentance
Dont votre grâce enfin me pénètre, et ma foi,
Et répéter : mes yeux son dessillés, je vois
Et j'appelle, ô mon Dieu, votre toute clémence !
Je l'appelle en tremblant car hélas ! il fallut
Que l'éclair rudement traversât mes ténèbres,
Et ce n'est que penché près d'un cierge funèbre
Que parmi votre livre, ô Sagesse, je lus !
Il fallut que la lueur fauve dans mon âme,
- Les fantômes aimés devant elle enfuis,
Montrât le vide immense et cette immense nuit
Où nul astre ne met sa consolante flamme.
Il fallut que l'effroi me jetât contre vous
Qui, le premier, jadis, vîntes vers nos misères,
Pour qu'enfant menacé, je vous nomme, ô mon Père,
Et que dans ma terreur j'enlace vos genoux…
Cependant votre esprit nous guide, il a ses vues
Et je m'y veux soumettre ici-même humblement ;
Mais songez au Prodigue, à la Brebis perdue
Et que ce n'est qu'en vous que j'espère à présent !

André Lafon (1883-1915)
Extrait de La Maison Pauvre,
Bibliothèque du Temps présent, 1911



Recueillement

J'ai tout abandonné pour vous, heure céleste !
Mes mains jointes n'ont rien de plus à vous offrir
Que la simplicité candide de leur geste
Vers les mains qui viendront doucement m'accueillir.

Tous mes livres ont clos leurs pages désolées.
Vainement j'ai voulu, pour vivre et me calmer,
Attiédir dans mon cœur leurs paroles gelées :
Aucun n'a le secret que je voudrais aimer.

Loin de l'obsession de l'espace et du nombre,
Je cherche à m'oublier moi-même. Sous mon front,
Mes pensers sont pareils à des miroirs dans l'ombre
Où des reflets avec des ailes passeront.

Je suis peut-être encore ébloui de mon rêve...
Non, j'ai dit sans faiblir l'adieu qu'il a fallu.
Océan de la paix, me voici sur ta grève ;
Un autre cœur a pris mon cœur irrésolu.

Je suis la coupe vide où tu vas, goutte à goutte,
O Prière ! tomber comme un baume puissant.
Vous pouvez me parler ; Seigneur ! mon âme écoute
Par delà tous les mots, hors du frisson des sens.

Je consens au départ de tout ce qui m'enivre.
Rien ne demeure en moi, vaine image ou vain bruit.
Mes yeux se sont fermés au mirage de vivre ;
Ouvrez-moi votre cœur, ô lumineuse nuit !

Le mien s'est embaumé de roses de souffrance ;
Ce n'est plus lui qui pleure et qui palpite en moi.
Emportez-le, Seigneur ! tout mon être s'élance
Vers l'abîme du Ciel que m'entr'ouvre la Foi...

Des ailes, donnez-moi des ailes, ô Silence !

Charles Grolleau (1867-1940)
Extrait de Sur la route claire,
Bibliothèque du Temps présent, 1913.
Ouvrage honoré du Prix de littérature spiritualiste en 1913.


Fons Signatus

Oui, que mon cœur devienne une source fermée
Dont l'invisible flot ne chante que pour Toi.
Que, marqué par tes mains du signe de la foi,
Ce cœur ne s'ouvre plus qu'à ta voix bien-aimée.

Que son onde mêlée à cette onde embaumée
Qui coule de ton Cœur au plus secret de moi,
Dans ses épanchements ne suive que la Loi
Qui la veut toute pure et pour jamais calmée.

Le sable du désert ne la souillera plus.
Elle s'enrichira de secrètes vertus ;
Ton amour lui fera perdre son goût d'argile,

Et, croissant en silence avec ma charité,
Ainsi que le promet ton divin Evangile,
Elle rejaillira jusqu'à l'éternité.

Charles Grolleau (1867-1940)
Extrait de Sur la route claire,
Bibliothèque du Temps présent, 1913.
Ouvrage honoré du Prix de littérature spiritualiste en 1913.




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