Le Saint Esprit

Les plus belles pages






Textes des Pères de l'Eglise

- Origène (v.185-v.255)
- Saint Augustin (354-430)
- Saint Jean Chrysostome (354-407)
- Diadoque de Photicé (V° siècle)
- Saint Jean Damascène (v.675-760)


Origène (v.185-v.255)

L'Esprit, dans l'Ecriture, ne se repose pas sur n'importe quel homme, mais seulement sur les saints et les bienheureux. L'Esprit de Dieu s'est reposé sur " ceux qui ont le cœur pur " et sur ceux qui purifient leurs âmes du péché ; au contraire Il n'habite pas un corps livré au péché, même s'Il y a habité un moment donné. L'Esprit-Saint ne peut souffrir ni communauté ni partage avec l'Esprit du mal. Il est certain qu'au moment du péché, c'est l'Esprit du mal qui est dans l'âme du pécheur et qu'il y joue un rôle. Aussitôt qu'on le laisse entrer et que nous l'accueillons en nous par de mauvaises pensées et par de mauvais désirs, l'Esprit-Saint, plein de tristesse et se trouvant à l'étroit, si j'ose ainsi m'exprimer, est chassé de chez nous. C'est pourquoi l'Apôtre, sachant que les choses se passent ainsi, donnait le conseil : " N'attristez pas l'Esprit-Saint dans lequel vous avez été marqués au jour de la Rédemption. " Donc par le péché, nous attristons l'Esprit-Saint ; au contraire par une vie juste et sainte, nous Lui préparons en nous un repos.

Extrait de Homélie sur les Nombres, in Sources chrétiennes


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Saint Augustin (354-430)

Le Maître intérieur

" L'onction que vous avez reçue de lui demeure en vous et vous n'avez pas besoin que quelqu'un vous enseigne, car son onction vous enseigne tout " (I Jean, II, 27).

Le mystère de l'onction, c'est la vertu invisible, l'onction invisible, l'Esprit-Saint. [...]

Que faisons-nous donc, frères, quand nous vous enseignons ? Si son onction vous enseigne toutes choses, alors nous travaillons pour rien ? Et pourquoi tant crier ? Il n'y a qu'à vous abandonner à son onction, et cette onction vols enseignera. [...] Voyez donc ce grand mystère, frères : le son de nos paroles frappe vos oreilles, le Maître est à l'intérieur. Ne pensez pas que l'on puisse apprendre quelque chose d'un homme. Nous pouvons attirer votre attention par le tapage de notre voix ; s'il n'y a pas au-dedans quelqu'un pour vous enseigner, ce tapage est inutile. Voulez-vous savoir, frères ? Est-ce que vous n'entendez pas tous ce sermon ? et pourtant combien sortiront d'ici encore ignorants ? Autant qu'il est en moi, j'ai parlé à tous ; mais ceux à qui cette onction ne parle pas au dedans, ceux que l'Esprit-Saint n'enseigne pas au dedans, s'en retourneront ignorants. Les enseignements du maître à l'extérieur sont comme des auxiliaires, des avertissements. Mais celui qui enseigne les cœurs a sa chaire dans le ciel [...] Qu'il vous parle lui-même au-dedans, quand personne n'est là ; car même si quelqu'un est à côté de toi, il n'y a personne dans ton cœur. Et qu'il n'y ait pas personne dans ton cœur, que le Christ soit en ton cœur, que son onction soit dans ton cœur, pour que tu n'aies pas dans ce désert le cœur assoiffé, sans avoir les sources qui puissent l'arroser.

C'est le Maître intérieur qui enseigne, le Christ qui enseigne, son inspiration qui enseigne. Où ne sont pas son inspiration et son onction, inutile est le tapage des mots au dehors. Les mots que nous prononçons au dehors, frères, sont comme le jardinier devant l'arbre ; il travaille au dehors, il apporte de l'eau et tout le soin de son travail ; mais tout ce qu'il apporte ainsi du dehors, est-ce cela qui forme les fruits ? qui revêt de feuilles ombreuses la nudité du bois ? est-ce qu'il fait à l'intérieur quelque chose de tel ? Mais qui agit ainsi ? Ecoutez le jardinier, l'Apôtre, et voyez ce que nous sommes, et écoutez le Maître intérieur : " J'ai planté, Apollos a arrosé ; mais Dieu a donné la croissance ; ce n'est pas celui qui plante qui est quelque chose, ni celui qui arrose, mais Dieu qui donne la croissance. " Voilà donc ce que nous vous disons ; que par notre parole nous plantions ou nous arrosions, nous ne sommes riens, mais c'est Dieu qui donne la croissance, c'est-à-dire c'est son onction qui vous enseigne toutes choses.

Extrait du Commentaire sur la I° Epître de saint Jean, tr. IV, ch. II, P.L. t. XXXV, trad. R.P. Camelot, in La Vie spirituelle, octobre 1946


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Saint Jean Chrysostome (354-407)

Mais pourquoi donc, me dira-t-on, n'y a-t-il plus aujourd'hui de signes miraculeux ? Ici, accordez-moi toute votre attention ; car un grand nombre de personnes me font cette question et la répètent sans cesse : pourquoi le don des langues était-il accordé autrefois aux baptisés, pourquoi ne l'ont-ils plus aujourd'hui ? Comprenons bien d'abord ce que c'était que le don des langues et nous expliquerons ensuite ce qui arrive. Qu'est-ce donc que le don des langues ? Le nouveau baptisé parlait aussitôt la langue des Indiens, des Egyptiens, des Perses, des Scythes, des Thraces, et un seul homme devenait capable de se faire entendre en beaucoup de langues, et si nos baptisés d'aujourd'hui l'avaient été en ces temps-là, vous les auriez tout de suite entendu parler des langues différentes. Car Paul trouva, dit-il, quelques disciples qui avaient reçu le baptême de Jean, et il leur dit : " Avez-vous reçu le Saint-Esprit depuis que vous avez embrassé la foi ? Ils lui répondirent : Nous n'avons pas seulement entendu dire qu'il y ait un Saint-Esprit. " Et aussitôt, il les fit baptiser. " Et après que Paul leur eut imposé les mains, le Saint-Esprit descendit sur eux, et ils parlaient diverses langues " (Act., XIX, 2-6). Pourquoi donc cette grâce a-t-elle disparu, n'est-elle plus accordée aux hommes d'aujourd'hui ? Ce n'est pas que Dieu nous fasse outrage, au contraire, c'est qu'il a grande estime de nous. Comment cela ? Je vais le dire. Les hommes d'alors étaient d'un esprit grossier, à peine affranchis du culte des idoles ; leur intelligence était épaisse et engourdie ; ils n'étaient frappés de saisissement, d'admiration que pour les choses corporelles ; impossible à eux de comprendre des biens qui n'ont pas de corps ; ils ne pouvaient concevoir la grâce spirituelle, visible seulement aux yeux de la foi ; voilà pourquoi il y avait des signes. C'est qu'en effet parmi les grâces spirituelles, les unes sont invisibles, la foi seule peut les comprendre ; les autres sont accompagnées d'un signe sensible, pour convaincre les infidèles. Exemple : la rémission des péchés, affaire spirituelle, grâce invisible : car comment nos péchés sont-ils dissipés de manière à purger notre âme, c'est ce que nous ne voyons pas des yeux de la chair. Pourquoi ? C'est que c'est l'âme qui est purifiée ; or, l'âme n'est pas visible aux yeux du corps. Donc la purification des péchés est un présent spirituel, qui ne peut être sensible aux yeux du corps. Mais le don des langues est aussi un effet de l'opération spirituelle de l'Esprit ; et, en même temps, cette opération est accompagnée d'un signe sensible, que les infidèles mêmes peuvent apercevoir. Quand l'opération a lieu dans l'âme, je dis l'opération invisible, la langue que l'on entend au dehors en est la manifestation et la preuve. De là ce que dit Paul : " A chacun la manifestation de l'Esprit a été donnée pour l'utilité " (I Cor., XII, 7). Donc aujourd'hui, moi du moins, je n'ai pas besoin de signes. Pourquoi ? C'est que j'ai appris à avoir foi dans le Seigneur, indépendamment de tout signe. L'infidèle a besoin de garantie ; mais moi qui suis un fidèle, je n'ai besoin ni de garantie, ni de signe ; bien que je ne parle pas une langue miraculeusement, je sais que j'ai été purifié de mes péchés. Les hommes d'alors n'auraient pas cru, s'ils n'avaient pas reçu un signe ; voilà pourquoi des signes leur furent donnés comme garantie de la foi qu'on leur demandait. Pour prouver que ce n'était pas aux fidèles, mais aux infidèles que des signes étaient donnés, afin de les rendre fidèles, Paul dit : " Les signes ne sont pas pour ceux qui croient, mais pour ceux qui ne croient pas " (I Cor., XIV, 22). Comprenez-vous que Dieu ne nous fait pas outrage, que c'est au contraire par estime pour nous qu'il a supprimé la manifestation des signes ? Il a voulu montrer que notre foi est indépendante des garanties et des signes, voilà pourquoi Dieu a fait ce qu'il a fait : les hommes d'autrefois demandaient avant tout un signe, une garantie pour croire Dieu sur les choses invisibles ; mais moi, indépendamment de tout cela, je montre une foi entière : Voilà donc pourquoi il n'y a plus de signes aujourd'hui.

Extrait de la Première Homélie sur la Pentecôte, in Œuvres complètes, trad. Jeannin, Arras, Sueur-Charruey, 1887 :


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Diadoque de Photicé (V° siècle)

Par le baptême de la régénération, la sainte grâce nous confère deux biens, dont l'un surpasse infiniment l'autre. Elle nous octroie immédiatement le premier ; car elle nous renouvelle dans l'eau même et fait briller tous les traits de l'âme, c'est-à-dire l'image de Dieu, en effaçant en nous tous les plis du péché. Quant à l'autre, elle attend notre concours pour le produire : c'est la ressemblance. Quand donc l'intellect a commencé de goûter, dans un sentiment profond, la bonté de l'Esprit-Saint, alors nous devons savoir que la grâce commence à peindre, pour ainsi dire, la ressemblance par-dessus l'image. De même, en effet, que les peintres tracent tout d'abord avec une seule couleur l'esquisse du portrait et que, faisant fleurir peu à peu une couleur sur l'autre, ils conservent jusqu'aux cheveux mêmes l'aspect du modèle, de même aussi la grâce de Dieu commence, dans le baptême, par refaire l'image ce qu'elle était quand l'homme vint à l'existence. Puis, quand elle nous voit aspirer de tout notre vouloir à la beauté de la ressemblance et nous tenir nus et sans préoccupations dans son atelier, alors, faisant fleurir vertus sur vertus et élevant la beauté de l'âme de splendeur en splendeur, elle lui procure la marque de la ressemblance. Ainsi donc le sens intime révèle bien que nous sommes en train d'être formés à la ressemblance ; mais la perfection de celle-ci, nous ne la connaîtrons que par l'illumination. Toutes les autres vertus, en effet, l'intellect, dans son progrès, les reçoit par le sens, selon une mesure et un rythme indicibles ; mais la charité spirituelle, nul ne peut y atteindre s'il n'est illuminé en toute plénitude par le Saint-Esprit. Car si l'intellect ne reçoit parfaitement la ressemblance grâce à la divine lumière, il peut avoir à peu près toutes les autres vertus, mais il reste encore dénué de la charité parfaite. En effet, quand il a été rendu semblable à la vertu de Dieu, autant évidemment qu'il est loisible à l'homme de se rendre semblable à Dieu, alors aussi il porte la ressemblance de la divine charité. De même, en effet, que dans les portraits toutes les nuances fleuries des couleurs, ajoutées à l'image, conservent, jusqu'au sourire même, la ressemblance du modèle, de même aussi, en ceux que la grâce divine peint à la ressemblance de Dieu, l'illumination de la charité, en s'y ajoutant, révèle que l'image a totalement rejoint la beauté de la ressemblance.

Extrait des Cent chapitres sur la perfection chrétienne, trad. E. des Places, in Sources chrétiennes


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Saint Jean Damascène (v.675-760)

Cet Esprit tout-puissant, splendide, incorruptible, procédait de la lumière incréée, de la substance que le Père transmet aux Fils ; aujourd'hui, langue de feu dans Sion, il manifeste aux nations cette lumière qu'il puise dans la divinité [...]
Enfant de l'Église, fils de la lumière, recevez la rosée enflammée de l'Esprit, et par elle la rémission et l'affranchissement de vos péchés ; car aujourd'hui la loi est sortie de Sion, la grâce du Saint-Esprit, sous la forme d'une langue de feu [...].

Pour nous, nous n'avons qu'un cri : Toi qui renouvelles divinement l'Univers, sois béni !

Mon âme a la nostalgie de Dieu ; toute en pleurs, elle Le recherche. Seigneur, Tu vois ma déchéance et ma douleur ; verse sur moi, le pécheur, la grâce de ton Saint-Esprit. Accorde-moi Ton esprit d'humilité afin que je puisse Te connaître.

Hymne extrait du Pentecostarion, in L'Année liturgique, Dom Guéranger, t. III, et Textes mystiques d'Orient et d'Occident, Solange Lemaître, Paris, Plon, 1936, t. II.